Cours d'optique ondulatoire



OPTIQUE ONDULATOIRE

1. Principe d'Huygens

1.1. Loi de Malus

2. Diffraction de Fraunhofer

2.1. Cas d'une fente rectangulaire

2.1.1. Pouvoir de résolution

2.2. Cas d'un réseau de fentes rectangulaires

2.3. Fentes de Young

3. Polarisation de la lumière

4. Cohérence et interférence

Dans ce chapitre seront dégagés certains éléments qui ont conduit au développement de la mécanique quantique. Effectivement, la mécanique quantique est née, en premier lieu, d'une étude attentive de la nature de la lumière. Bien que cette science nouvelle soit développée au début du 20ème siècle, les considérations qui l'ont guidée alors sont incontestablement le résultat de 25 siècles de maturation. Au fond, c'est à une longue histoire de la lumière pleine de contreverses que la mécanique quantique apporte enfin au 20ème siècle une magistrale conclusion.

PRINCIPE D'HUYGENS

Huygens visualisait la propagation de la lumière comme résultant d'un processus de génération d'ondelettes sphériques en chaque point atteint par un front d'onde, ondelettes dont la somme donnait le champ en propagation. En traçant la tangente aux fronts d'onde des ondelettes à un instant donné, on obtenait le front d'onde de l'onde totale à ce même instant.

Nous rappelons qu'une surface d'onde ou "front d'onde" (cf. chapitre de Mécanique Ondulatoire) est le lieu des points du milieu atteins par le mouvement ondulatoire au même instant. La perturbation a donc même phase en tous points d'une surface d'onde. Pour une onde plane, par exemple, la perturbation s'exprime par (nous l'avons démontre dans le chapitre traitant de la Mécanique Ondulatoire) :

equation   (40.1)

ou dans une formulation plus générale :

equation   (40.2)

qui donne donc l'expression de la propagation de la perturbation pour laquelle la "surface d'onde" est le lieu des points où la phase equation a même valeur à un instant donnée. La surface d'onde est donnée en conséquence par l'équation :

equation   (40.3)

Huygens, a donné une méthode imagée de représentation du passage d'une surface d'one à une autre dans le cas où l'onde est supposée résulter du mouvement des particules constituant le milieu matériel. Ainsi, si nous considérons la surface d'onde S ci-dessous :

equation
  (40.4)

Quand le mouvement ondulatoire atteint cette surface, chaque particule a,b,c,... de la surface devient une source secondaire d'ondes, émettant des ondes secondaires (indiquées par les petits demi-cercles) qui atteignent la couche suivante de particules du milieu. Ces particules sont mises en mouvement et forment la nouvelle surface d'onde S' et ainsi de suite... Ainsi, Huygens avait une conception ondulatoire de la lumière, mais il ne considérait pas la nature périodique de l'onde, ce qui ne lui permettait pas d'introduire la notion de couleur de la lumière; de plus, selon son principe, une onde se propageant en sens inverse à celui de l'onde incidente devrait aussi se manifester, ce qui n'est pas le cas dans un matériau homogène.

L'intuition d'Huygens est cependant proche de la réalité, comme le montrera Fresnel dans sa théorie de la diffraction. Il faudra cependant attendre Kirchhoff, qui introduira un facteur d'inclinaison (oblicité) dans la théorie, pour obtenir une explication de l'absence d'onde se propageant vers l'arrière (le temps venu nous rédigerons les développements y relatifs).

LOI DE MALUS

Comme tous les "points correspondants" equation.sont équidistants, par le principe d'Huyghens, la "loi de Malus" (la première donc et pas celle obtenue lors de l'étude de la polarisation de la lumière comme nous le verrons plus loin) affirme que l'intervalle de temps entre les points correspondants de deux surfaces d'onde est le même pour tout couple de points correspondants.

Conséquences (se référer en même temps à la figure ci-dessous) :

equation

equation
  (40.5)

- Lorsque l'onde se propage dans un milieu homogène, les rayons lumineux doivent être rectilignes et les surfaces d'onde rester parallèles.

- Lorsque l'onde change de milieu, les distances entre deux paires de points correspondants varient d'un milieu à l'autre, si les vitesses de propagation sont différentes.

Cette loi permet de retrouver le loi de Descartes-Snellius que nous avons déjà démontré en optique géométrique, ce qui assure à priori que le principe d'Huygens reste valide dans le cadre de l'optique géométrique.

Démonstration:

Selon la figure ci-dessus, nous avons :

equation   (40.6)

en divisant chaque terme par equation, nous obtenons :

equation   (40.7)

Comme equation nous obtenons donc bien la loi de Descartes-Snellius telle que nous l'avions obtenu en optique géométrique :

equation   (40.8)

DIFFRACTION DE FRAUNHOFER

Du point de vue de l'optique géométrique, un faisceau lumineux est un cylindre de section equation qui rassemble un grand nombre de rayons parallèles. Il est donc supposé rectiligne lorsqu'il est défini dans un milieu homogène.

L'émittance énergétiqueequation du faisceau ne varie que si une lentille (ou un autre dispositif) fait varier sa section equation ou si le milieu absorbe de l'énergie.

Le faisceau lumineux "éclate" quand un obstacle ne laisse passer qu'une partie equation de sa section.

Le principe d'Huygens montre que ce sont les bords de l'obstacle qui engendrent cette diffraction.

Le phénomène est général mais n'est bien observable que si le rapport equation est très grand. L étant la longueur des bords. Cette condition est nécessaire pour que l'intensité de la partie non diffractée du faisceau ne masque pas l'effet.

Définitions:

D1. Nous parlons de "diffraction de Fraunhofer" lorsque, comme supposé précédemment, les rayons lumineux incidents sont parallèles et le phénomène observé à relativement grande distance de l'écran.

D2. Nous parlons de "diffraction de Fresnel" lorsque les rayons incidents forment un faisceau divergent, en provenance d'une source ponctuelle ou si nous observons le phénomène à faible distance.

Considérons un cas générique et le plus répandu dans les laboratoires de physique qui est la diffraction par une fente rectangulaire étroite :

Pour cela, nous considérons que le faisceau incident est une onde électromagnétique plane et périodique, perpendiculaire à la fente et donnée par :

equation   (40.9)

Rappel : Sa longueur d'onde étant donnée par equation

CAS D'UNE FENTE RECTANGULAIRE

La largeur e de la fente est orientée selon l'axe y, sa hauteur h est supposée très grande afin de pouvoir négliger l'effet des extrémités.

Suivant le principe d'Huygens, le front de l'onde plane, délimité par la fente, constitue une multitude de sources equation, de largeur dy, qui émettent, en phase, des ondelettes sphérique décrites par leur vecteur champ associée :

equation   (40.10)

Considérons maintenant un point d'observation P, à une distance R de la source (assimilée à la fente). Nous avons vu lors de l'étude des sources d'émission de type sphériques (cf. chapitre d'Électrodynamique) que leur amplitude diminuait de manière inversement proportionnelle à la distance telle que :

equation   (40.11)

Or, les ondelettes, suivant à quel point de la fente elles sont assimilées, ne vont pas toutes parcourir la même distance R mais un distance propre r . Cependant, si R est suffisamment éloigné de la fente, nous nous permettrons d'approximer :

equation   (40.12)

reste encore le terme périodique equation où nous posons equation. Or, nous avons pour valeurs extrêmales :

equation   (40.13)

Ces valeurs correspondant respectivement, à l'avance et au retard des fonctions d'onde décrivant la propagation des ondelettes dans les extrémités de la fente.

Effectivement, il suffit de voir la figure ci-dessous, en considérant donc equation et ainsi :

equation

equation
  (40.14)

Ainsi, nous avons :

equation   (40.15)

Donc les différentes ondelettes sont déphasées et produisent ainsi des interférences.

Définition: En mécanique ondulatoire, on parle "d'interférences" lorsque deux ondes de même type se rencontrent. Ce phénomène se rencontre souvent en optique avec les ondes lumineuses, mais il apparaît également avec les ondes sonores.

L'onde diffractée dans la direction de equation, est alors donnée par la somme de toutes les contributions :

equation   (40.16)

Sachant que (relations trigonométrique) :

equation   (40.17)

Nous avons donc :

equation   (40.18)

Nous avions démontré dans le chapitre d'Électrodynamique que l'énergie (in extenso l'intensité) d'une onde électromagnétique était donnée (dans le vide) par la valeur scalaire moyenne du vecteur de Poynting :

equation   (40.19)

Nous avons donc :

equation   (40.20)

qui est l'émittance lumineuse émise dans la direction equation.

Si nous introduisons le sinus cardinal que nous avons déjà rencontré lors de notre étude des transformées de Fourier dans le chapitre sur les Suites et Séries nous avons alors l'écriture de la relation précédente qui se trouve nettement condensée:

equation   (40.21)

Dont nous pouvons avoir une forme générique tracée avec Maple en utilisant:

>Gamma:=3;plot((sin(Gamma*x)/(Gamma*x))^2, x=-Pi..Pi);

Donc nous pouvons obtenir le même résultat en prenant le module au carré de la transformée de Fourier d'un signal monochromatique au travers d'une fenêtre rectangulaire. Ainsi, il semble possible d'étudier les phénomènes de diffraction en utilisant la transformée de Fourier et ce domaine se nomme "l'optique de Fourier".

Voici une représentation graphique du rapport equation pour différentes valeurs du rapport equation:

equation
  (40.22)

De part et d'autre de la frange centrale, il y en a d'autres, plus étroites et disposées symétriquement. Leur intensité diminue très rapidement selon le terme prépondérant au dénominateur :

equation

equation
  (40.23)

Dont voici une image réelle:

equation
  (40.24)

Entre les franges, se trouvent des zones d'obscurité qui sont le siège d'interférences destructives. Leur position sont données par la condition :

equation   (40.25)

sauf pour equation où l'on observe un maximum !

Nous observons donc des franges sombres dans les directions :

equation   (40.26)

Ainsi, la largeur angulaire de la frange centrale est le double de la valeur angulaire obtenue pour le premier minimum :

equation   (40.27)

Nous obtenons la largeur des pics suivants, comme suit :

Deux minima successifs satisfont donc les conditions :

equation   (40.28)

Ainsi :

equation   (40.29)

En posant:

equation  (40.30)

il vient dès lors :

equation   (40.31)

Puisque l'émittance énergétique diminue très rapidement, seules les premières franges (pour lesquelles equation) sont observables. Il reste :

equation   (40.32)

Les positions des maxima sont elles données par la condition :

equation   (40.33)

Posons :

equation   (40.34)

La résolution numérique de :

equation   (40.35)

donne (en radians) :

equation   (40.36)

Les positions des maxima successifs sont alors :

equation   (40.37)

etc...

Nous aurions facilement pu obtenir une approximation convenable de ce résultat, en considérant que l'intensité est maximale lorsque :

equation   (40.38)

Ce qui nous amène à écrire :

equation avec equation   (40.39)

Remarque: Un résultat remarquable de l'expérience de Fraunhofer est qu'elle remet en question la vision corpusculaire de la lumière telle que nous l'avions au 19ème siècle. 

Effectivement, beaucoup d'expériences telle que la projection de l'ombre d'un objet sur un mur semblait bien montrer que la lumière était tel un corpuscule ne traversant pas la matière et étant stoppée net par tout obstacle que ce soit en son centre ou en ses bords (il faut attirer votre attention sur les "bords" en particulier). 

Or, l'expérience de Fraunhofer ainsi qu'en particulier celle de Fresnel en ce qui concerne les bords (nous la verrons plus loin car elles est mathématiquement plus délicate à aborder), montrent bien que la lumière semble pouvoir se comporter non pas comme un simple corpuscule mais bien comme une onde (à partir du principe de d'Huygens que nous avons utilisé pour nos développements) tel que nous l'ont montré les développements précédents qui expliquent parfaitement bien les résultats expérimentaux des diffractions de Fraunhofer.

Mais alors pourquoi garder le modèle corpusculaire de la lumière? Tout simplement pour d'autres résultats expérimentaux et théoriques dont pour les plus connus tel que l'effet photo-électrique ou la diffraction Compton (cf. chapitre de Physique Nucléaire) qui s'expliquent théoriquement à merveille si ce n'est parfaitement avec un modèle corpusculaire de la lumière (et certaines autres particules de dimension, charge, spin, etc. donné).

Au fait, comme nous le verront dans le chapitre de Physique Quantique Ondulatoire, c'est le physicien De Broglie qui va mettre définitivement un terme à cette dualité paradoxale en reliant à l'aide des outils de la mécanique relativiste et physique quantique ondulatoire les deux aspects mathématiquement.

POUVOIR DE RÉSOLUTION

Selon le critère du physicien anglais Lord Rayleigh : le "pouvoir de résolution" (ou "pouvoir séparateur angulaire") d'une fente, est l'angle equation entre deux rayons lumineux de longueur d'onde equation, issus de deux sources ponctuelles equation, éloignées, dont les figures de diffractions sont séparées telles que le premier zéro de la figure de diffraction se trouve à la place du maximum de l'autre:

equation
  (40.40)

Ce concept est énormément utilisé en photographie, astronomie, radioastronomie, etc. Il convient donc d'y porter une attention toute particulière!

Or, nous avons vu que les minimas étaient donnés par :

equation   (40.41)

et donc pour equation :

equation   (40.42)

Donc le pouvoir séparateur angulaire est proportionnel au rapport de la longueur d'onde à l'épaisseur de la fente. Evidemment dans la pratique le but est d'avoir une valeur d'angle equation la plus grande possible (sinon les objets de confondent et l'image est floue).

Pour augmenter le pouvoir de résolution il faut donc soit travailler à une longueur
d'onde plus courte soit augmenter l'épaisseur de la fente de l'instrument et comme la longueur d'onde est souvent imposée par le sujet d'expérience il est naturel de vouloir de faire varier e.

Si la lumière qui passe à travers une fente forme une image sur un écran, et que l'image est observée au microscope par exemple, il est impossible, quel que soit le grandissement du microscope, d'observer plus de détails dans l'image qu'il n'est permis par le pouvoir de résolution de la fente. Il faut tenir compte de ces considérations dans la conception des instruments d'optique.


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