FORMULES DE DESCARTES
1. Sources et ombres
3.1. Flux énergétique
3.1.1. Loi de Beer-Lambert
3.2. Intensité lumineuse
3.3. Emittance énergétique
3.4. Luminance énergétique
3.4.1. Loi de Lambert
3.5. Loi de Kirchhoff
3.6. Décomposition spectrale
4.1. Principe de Fermat
4.2. Loi de Snel-Descartes
4.3. Effet Tcherenkov (Cerenkov)
5.1. Équation de conjugaison
Nous avons discuté précédemment certains phénomènes qui se produisent lorsqu'un front d'onde passe d'un milieu à un autre dans lequel la propagation est différente. Non seulement nous avons analysé ce que devient le front d'onde, mais encore nous avons introduit le concept de "rayon" qui est particulièrement utile pour les constructions géométriques. Nous nous proposons maintenant d'approfondir les phénomènes de réfraction et de réflexion d'un point de vue géométrique en utilisant le concept de rayon comme l'outil permettant de décrire les processus qui prennent place aux surfaces de discontinuité de la propagation. Nous admettrons également que les processus se limitent à des réflexions et réfractions, aucune autre modification n'affectant les surfaces d'onde.
Ce traitement géométrique est correct tant que les surfaces et les discontinuités rencontrées par l'onde au cours de sa propagation sont très grandes devant la longueur d'onde. Tant que cette condition est remplie, le traitement s'applique aussi bien aux ondes lumineuses, acoustiques (en particulier ultrasonores - très hautes fréquences), sismiques, etc.
Nous commençons par considérer la réflexion des ondes sur une surface. Nous devons d'abord établir certaines définitions. Le centre de courbure C (cf. chapitre de Géométrie Différentielle) est le centre de la surface sphérique de la figure ci-dessous et le sommet O est le pôle de la calotte sphérique.
Définition: La droite passant par O et C est appelée "axe optique".
Si nous prenons O pour origine des coordonnées, toutes les quantités mesurées à droite de O seront prises comme positives, toutes celles à gauche comme négatives.
(39.60)
Supposons que le point P soit une source d'ondes sphériques. Le rayon
donne par réflexion le rayon
et, comme les angles d'incidence et de réflexion sont égaux
par rapport à la perpendiculaire AC de la surface (comme nous l'avons déjà fait remarquer
lors de notre étude de la réfraction), nous voyons
sur la figure que :
et
(39.61)
d'où :
(39.62)
En admettant que les angles
et
sont très petits, c'est-à-dire que les rayons sont
"para-axiaux" et que la source est
très distante ou que
le détecteur est très petit par rapport à la
source, nous pouvons écrire avec une bonne approximation
(développement
de MacLaurin pour de petits angles) :
(39.63)
En substituant ces valeurs approximatives
de
et
dans
,
nous obtenons :
(39.64)
qui est la "formule de Descartes pour la réflexion sur une surface sphérique concave". Elle implique, dans l'approximation utilisée pour l'établir, que pour tous les rayons incidents passant par P passeront par Q après réflexion sur la surface. Nous pouvons alors dire que Q est "l'image de l'objet" P.
Dans le cas particulier où le
rayon incident est parallèle à l'axe optique, ce qui
équivaut à placer l'objet à une très
grande distance du détecteur, nous avons
. La formule de Descartes devient alors :
(39.65)
et l'image se forme au point F appelée "foyer", et sa distance du détecteur donnée par :
(39.66)
est appelée "distance focale".
La relation obtenue précédemment est également valable pour une surface convexe. Effectivement, il suffit de tirer les traits représentant les rayons lumineux au-delà de la surface concave pour voir que l'objet d'étude est le même à une symétrie près :
(39.67)
La seule différence entre la surface concave et convexe tient au fait que dans le cas de la surface convexe, l'image de l'objet réfléchi apparaît comme s'il semblait être derrière la surface (à l'équivalent du point P). Ceci nous amène à définir la terminologie suivante :
Définition: Dans le cas d'une surface concave, nous disons que l'image d'un objet est une "image réelle" alors que dans le cas d'une surface convexe, nous disons que l'image d'un objet est une "image virtuelle".
Par contre pour le miroir parabolique tous les rayons convergent vers le foyer du miroir où est concentrée l'énergie lumineuse reçue par le miroir. Réciproquement, nous plaçons le filament d'une lampe au foyer d'un miroir parabolique pour obtenir des projecteurs de grande portée. Nous donnons aussi une forme parabolique aux antennes de réception des ondes hertziennes. Pour la télévision diffusée par des satellites comme on travaille en ondes centimétriques (fréquence de quelques GHz) une distance focale de l'ordre du mètre est convenable pour l'antenne (in extenso cela s'applique aux télescopes et radiotélescopes).
(39.68)
L'idée pour démontrer que le foyer de la parabole est le point stigmatique rigoureux est la suivante :
Reprenons le schéma que nous avons utilisé lors de notre étude des coniques dans le chapitre de Géométrie Analytique :
(39.69)
Nous y avons rajouté le
point
qui est la projection orthogonale du point M (point
d'incidence du rayon lumineux) ainsi que la tangente de la parabole
au point M.
Si nous arrivons à démontrer que la tangente à
M est la médiatrice du segment
,
alors nous démontrons également que l'angle d'incidence
et de réflexion sont bien égaux.
Prenons l'équation :
(39.70)
d'une
parabole de paramètre (cf.
chapitre de Géométrie Analytique) rapporté à un
repère
principal
.
Le foyer à donc pour coordonnées
et
la directrice a pour équation :
(39.71)
Nous obtenons l'équation
de la tangente en
par la dérivée en ce même point (attention...
rappelez-vous de l'orientation particulière de la parabole!)
:
(39.72)
Ce qui s'écrit encore :
(39.73)
et en sachant que :
(39.74)
nous obtenons donc l'équation de la tangent :
(39.75)
Un des vecteurs directeur de la tangente est donc alors :
(39.76)
D'autre part, nous avons (cela se vérifie
facilement en posant )
:
et
(39.77)
Nous avons donc le produit scalaire :
(39.78)
comme les vecteurs et
ont même norme d'après la définition de la
parabole, nous en déduisons déduit que le vecteur
(directeur de la tangente) dirige la bissectrice de l'angle des
vecteurs
et
et donc par extension que la tangent à M est bien la médiatrice de
.
Nous pouvons toujours dans le cadre des surfaces sphériques, déterminer le grandissement :
(39.79)
où pour rappel le centre de courbure C (cf. chapitre de Géométrie Différentielle) est le centre de la surface sphérique de la figure ci-dessous et le sommet O est le pôle de la calotte sphérique.
Ainsi, le "grandissement" M d'un système optique est défini comme le rapport de la grandeur de l'image ab à celle de l'objet AB, c'est-à-dire :
(39.80)
Nous voyons d'après la figure ci-dessus que :
(39.81)
Nous avons donc, en tant compte de
ce que
:
(39.82)
d'où :
(39.83)
Faisons maintenant une étude équivalente à celle effectuée précédemment, ayant les mêmes propriétés de symétrie et les défauts, mais sur les "dioptres sphériques" (résultats intéressant pour ce qui est de l'étude de l'oeil).
Nous allons donc considérer
la réfraction au passage d'une surface sphérique séparant
deux milieux d'indices de réfaction absolus
et
(voir figure ci-dessous).
(39.84)
où pour rappel le centre de courbure C (cf. chapitre de Géométrie Différentielle) est le centre de la surface sphérique de la figure ci-dessous et le sommet O est le pôle de la calotte sphérique.
Les éléments géométriques fondamentaux sont les mêmes que ceux définis pour les surfaces sphériques.
Nous considérons donc dans un premier temps un dioptre concave et observant que la "distance objet" est situé à l'opposé des autres points, nous devons opter à une convention de signe pour mettre cette observation en évidence dans les équations. Ainsi, q sera défini comme une valeur négative.
Un rayon incident tel que PA est réfracté suivant AQ et coupe donc l'axe optique en q. Nous observons sur la figure que :
et
(39.85)

Nous avons d'après la loi de Snell :
(39.86)
et nous admettrons comme pour les surfaces
sphériques que les rayons sont peu inclinés. Dans
ces conditions les angles
et
sont très petits et que nous pouvons écrire à
l'aide des développement en série de MacLaurin
et
de sorte que la loi de Snell s'écrit :
(39.87)
D'après la figure nous pouvons faire les approximations :
(39.88)
de sorte qu'en substituant dans l'approximation de la loi de Snell nous trous après simplification élémentaire :
(39.89)
qui constitue la "formule de Descartes pour la réfraction au passage d'une surface sphérique". Bien qu'elle ait été démontrée dans le cas d'une surface concave, elle reste valable pour les surface convexe en tenant compte alors de ce que r est négatif à son tour.
Le "foyer
objet"
appelé également "premier point
focal" d'une surface
sphérique réfringente est la position d'un point objet
de l'axe optique tel que les rayons réfractés soient
parallèles à l'axe optique, ce qui revient à
former l'image du point à l'infini, où
.
La distance de l'objet à la surface sphérique est
appelée alors "distance focale objet", et nous la désignons
par
.
En posant
et
.
Nous avons alors :
(39.90)
La distance focale
est positive et le système dit "convergent" quand le foyer
objet est réel, placé devant la surface sphérique.
Quand le foyer objet est virtuel la distance focale
est négative et le système est dit "divergent".
De même, si les rayons
incidents sont parallèles à l'axe optique, ce
qui revient à
avoir un objet très éloigné de la surface
sphérique
,
les rayons réfractés passent par un point
de l'axe optique appelé "foyer image" ou "second
point focal"
(avec à nouveau les même problèmes de stigmatisme).
Dans ce cas la distance de la surface sphérique à
l'image est appelée "distance focale
image" et nous la désignons
par
.
En posant
et
nous avons alors :
(39.91)
Intéressons nous maintenant à un autre type de surface réfléchissantes et réfractantes: les lentilles.
Une lentille est par définition un milieu transparent limité par deux surfaces courbes (généralement sphériques), bien que l'une des faces d'une lentille puisse être plane. Une onde incidente subit donc deux réfractions à la traversée de la lentille. Admettons pour simplifier que les milieux de part et d'autre de la lentille sont identiques et leur indice de réfraction égal à 1 (l'air ou le vide par exemple) tandis que l'indice de réfaction de la lentille est n. Nous ne considérerons également que les lentilles minces, c'est-à-dire dont l'épaisseur est très petite devant les rayons de courbure :
(39.92)
L'axe optique est maintenant
la droite déterminée par les deux centres .
Considérons le rayon incident PA passant
par P.
Au passage de la première surface, le rayon incident est
réfracté suivant le rayon AB.
Si nous le prolongions, le rayon AB passerait
par Q' qui est donc l'image de P donnée
par le premier dioptre. La distance q' de Q'
à
s'obtient par l'application de la seconde formule de Descartes
(sans oublier que la première partie de la lentille est
un dioptre convexe) :
(39.93)
Mais en ayant
d'où :
(39.94)
En B le
rayon subit une deuxième réfraction et devient
le rayon BQ.
Nous pouvons dire alors que Q est "l'image
finale" de
produit par le système des deux dioptres constituant la
lentille. Mais, en considérant la réfraction en
B, l'objet (virtuel) est Q'
et l'image est Q,
à une distance q de la lentille. Donc, en appliquant à nouveau :
(39.95)
avec à nouveau
et en prenant garde au fait que selon notre point de référence
q devient -q'
nous avons alors :
(39.96)
En combinant les deux relations précédentes pour éliminer q' nous trouvons que :
(39.97)
ce que constitue la "formule
de Descartes pour les lentilles minces". En écrivant
cette équation,
il convient d'appliquer à
la convention des signes que nous avons fixés, c'est-à-dire
que les rayons sont positifs pour une surface concave et négatifs
pour une surface convexe, vue du côté duquel la
lumière
frappe la lentille.
Le point O dans la figure précédente, est choisi de façon à coïncider avec le "centre optique" de la lentille. Le centre optique à pour propriété d'être un point tel que tout rayon passant par lui sort parallèlement à la direction du rayon incident!!
Pour montrer qu'en tel point existe, considérons, dans la lentille ci-dessous (à symétrie horizontale et verticale) :
(39.98)
Considérons les deux rayons
parallèles
générateurs des dioptres (éléments de
la lentille) choisis tels que les plans tangents correspondants
et
sont par construction aussi parallèles.
Pour le rayon ,
dont la direction est telle qu'il se réfracte suivant
,
le rayon émergent est
et parallèle à
de par la symétrie horizontale de la lentille. Ainsi, les
triangles
et
étant semblables quels que soient les "rayons
générateurs",
nous voyons ainsi que la position de O est satisfaite par la relation :
(39.99)
et existe donc indépendamment des rayons générateurs.
Comme dans le cas d'un simple dioptre,
le foyer objet ,
ou "premier point focal d'une lentille" est la position de l'objet
pour laquelle les rayons émergent parallèlement à
l'axe optique (
)
après avoir traversé la lentille. La distance de la
lentille à
est alors appelée "distance focale
objet" nous la désignons
par f.
En posant alors
et
dans l'équation de Descartes précédente, nous
obtenons la distance focale objet sous la forme :
(39.100)
que nous appelons parfois "équation de l'opticien".
Pour un rayons incident
parallèle
à l'axe optique (q - f)
le rayon émergent passe un point ,
caractérisé par
,
et appelé "foyer image d'une lentille" ou "second
point focal d'une lentille".
Par conséquent,
dans une lentille mince les deux foyers sont placés symétriquement
de chaque côté.
Par ailleurs, si f est positif, la lentille est dite "lentille convergente", si f est négatif elle est dite "lentille divergente".
ÉQUATION DE CONJUGAISON
Tout point d'un objet étendu (non ponctuel donc!) envoie de la lumière dans toutes les directions de l'espace. Si une partie de cette lumière tombe sur une lentille, elle en émerge soit convergente en un point, soit divergente en semblant venir d'un point image.
Pour trouver l'image, il suffit alors de considérer intuitivement les situations suivantes dans le cas d'une lentille convexe (à gauche) ou concave (à droite):
1. Si les rayons lumineux, non confondus avec l'axe de symétrie horizontal de la lentille, passent par le centre optique O de la lentille convexe ou concave, nous avons vu plus haut qu'à ce moment ils sortent alors parallèles aux rayons entrants.
2. Si les rayons lumineux, confondus avec l'axe de symétrie horizontal de la lentille, passent par le centre optique O de la lentille convexe ou concave (donc ils passent par le centre optique O) alors ils seront non déviés (c'est une situation particulière du cas suivant!).
3. Si les rayons lumineux partant de l'objet et se dirigeant
vers la lentille sont parallèles à l'axe de symétrie
horizontal de la lentille et
non confondus
ou confondus
avec ce dernier, alors si la lentille est convexe nous avons
démontré
qu'ils convergent tous sur un même foyer image.
4. Si les rayons lumineux partant de l'objet et se dirigeant
vers la lentille sont parallèles à l'axe
de symétrie horizontal de la lentille et non confondus
ou confondus avec ce dernier, alors si la lentille est concave
nous avons démontré qu'ils divergent tous et qu'ils
ont une image virtuelle venant pour tous du foyer objet (c'est
la situation miroir du cas précédent!).
5. Tous les rayons partant de l'objet qui ne sont pas parallèles
à l'axe de symétrie horizontal de la lentille et qui ne passent
pas par le foyer objet en
se dirigeant vers la lentille convexe alors sortiront non parallèles
de la lentille.
6. Tous les rayons partant de l'objet qui ne sont pas parallèles à l'axe
de symétrie horizontal de la lentille et qui ne passent
pas par le foyer objet en
se dirigeant vers la lentille concave alors sortiront non parallèles
de la lentille (c'est le cas miroir du cas précédent).
Si nous sommes attentifs, nous voyons que les 6 situations ci-dessus qui sont intuitives peuvent se réduire par symétrie miroir à 3 situations (1), (3), (5).
Appliquons cette superposition à l'exemple de la fleur ci-dessous située à une distance entre f et 2f d'une lentille convergente (convexe).
Du sommet S, traçons ses 3 rayons. Ils convergent par construction géométrique (donc résultat à accepter tel quel) au même point P (ce que nous avons démontré), qui est l'image du sommet S de la fleur mais à une distance non symétrique par rapport à O. De même, E est l'image de D.
(39.101)
Le schéma ci-dessus fournit donc une relation analytique entre les distances de l'image et de l'objet et la distance focale.
Les triangles
et
sont semblables et tous leurs angles sont donc égaux ce
qui nous amène à écrire par application du
théorème
de Thalès (cf. chapitre de Géométrie
Euclidienne) :
(39.102)
où .
Les triangles SOD et POE sont aussi semblables d'où à nouveau par application de Thalès :
(39.103)
En combinant les deux derniers rapports, nous obtenons ainsi "l'équation de conjugaison" (qui ne s'accorde pas...) :
(39.104)
L'application de cette équation
est très importante. Elle permet en définissant à
quelle distance
on place un objet de la lentille et en souhait avoir son image à
une distance
,
quelle doit être la distance focale de la lentille convergente
(et ce indépendamment des indices de réfraction !).
Un peu de biologie... :
Le cristallin de l'oeil pouvant se déformer sous l'effet de certains muscles, constitue une lentille à focale variable permettant d'accommoder la vision des objets à distance variable. La distance du centre optique à la rétine étant fixe, le seul moyen de voir clairement des objets situés à des distances différentes est de modifier la distance focale. Dans son état ordinaire, le cristallin a une configuration assez plate, avec un grand rayon de courbure (il a alors une grand distance focale).
L'oeil à pour rôle de focaliser la lumière provenant d'un objet à l'infini (environ 25 centimètres pour un humain moyen...) sur la rétine. Mais tous les yeux ne font pas cela correctement et le "punctum remotum" (distance maximale de vision distincte sans accommodation) est parfois à une distance finie, même parfait inférieur à cinq mètres (entraînant probablement une fatigue des yeux).
Si l'objet s'approche, les muscles se contractent, le cristallin gonfle et sa distance focale diminue de façon que l'image se forme toujours sur sa rétine. Le point le plus proche qui peut être vu clairement avec le maximum d'accommodation est appelé le "punctum proximum". Cette distance évolue beaucoup avec l'âge : elle est de dix centimètres pour un enfant de dix ans, de cent centimètres pour une personne de soixante ans (c'est la presbytie).
Il est habituel de parler
de "puissance dioptrique" d'une
lentille qui est simplement l'inverse de sa distance focale.
La puissance d'une lentille s'exprime ainsi en "dioptries"
où
.
Ainsi :
(39.105)
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